👋 Hola ! Ce vendredi, on se penche sur la question du consentement au perreo (pas encore toujours respecté). La suite de cette édition sera plus nostalgique, à la (re)découverte de ce qui a marqué la scène reggaeton cette année. Au menu notamment : un portrait du producteur Tainy et mes titres coups de cœur de 2023. Bonne lecture 💌
Je ne suis plus aussi fan de Rauw Alejandro. Si vous suivez son actualité ou celle de la Catalane Bad Gyal, vous n’avez pas pu passer à côté des dizaines de TikToks sur la « polémique » qui a eu lieu à l’un des concerts du reggaetonero mi-décembre à Porto Rico. Bad Gyal est ce soir-là l’une de ses invité·e·s. Sauf qu’après avoir partagé une chanson ensemble, Rauw Alejandro lance : « Je voulais perrear avec Bad Gyal mais elle était un peu timide ».
Le reggaetonero insiste encore : « Si je suis célibataire Mademoiselle... ». « Je vais faire ce que j’ai à faire, c’est-à-dire chanter », lui refuse Bad Gyal. La chanteuse espagnole est très rapidement soutenue sur les réseaux sociaux pour avoir réussi à décliner la danse. « Rauw, c’est l’homme excessif d’une discothèque », s’exaspère une utilisatrice sur TikTok. Les deux artistes ont depuis tenu à éclaircir le moment. « Je voulais éviter d’être trop proche de Rauw parce que […] je sais que j'aurais probablement été liée à lui différemment alors que nous ne sommes que des amis », a expliqué la reggaetonera dans une story Instagram, soulignant ne pas s’être sentie agressée.
Si la vidéo a cependant fait autant réagir, c’est qu’elle illustre parfaitement ce que peuvent vivre les femmes qui pratiquent le perreo. En club, cette danse très sexualisée, où les corps sont très proches, apparaît pour beaucoup d’hommes comme une invitation à danser, voire à toucher. La récurrence des agressions sexuelles dont sont victimes les femmes pendant le perreo a notamment été mise en lumière dans une thèse portant sur les « jeunes femmes et la danse du perreo » en 2017 au Mexique. « L’objectification des femmes trouve une expression singulièrement forte dans ce genre musical », rappelle par ailleurs dans un article publié cet été l’enseignant-chercheur Victor Santos Rodriguez.
Pour les femmes originaires d’Amérique centrale ou du Sud vivant en Europe, danser le perreo est en outre souvent synonyme de fétichisation. « On se faisait harceler, on était éxotisé, on était dérangé tout le temps », raconte Bárbara Martínez, originaire du Mexique et co-fondatrice du collectif Misantropical, en se rappelant ses premières soirées reggaeton à Paris.
Le consentement au perreo est néanmoins aujourd’hui de plus en plus mis en avant. Les nombreux commentaires sous les vidéos de Bad Gyal et de Rauw Alejandro témoignent aussi de l’importance accordée à l’idée d’un « perreo consentido (consenti en français) » ces dernières années. « Il est intéressant que les attitudes des artistes de reggaeton soient remises en question. Comme dans d’autres domaines de la société, ce genre musical a connu une déconstruction », relève l’agente Gris Onofre au quotidien El Mundo.
Dans la scène reggaeton parisienne par exemple, les différents collectifs tendent à rendre leurs soirées plus sûres pour les femmes et les minorités de genre. Les pistes de danse proposées par Perreo Supremo sont ainsi présentées comme une « zona de perreo duro y consentido (zone de perreo intense et consentie en français). « Prenez soin d’avoir un consentement pour interagir avec l’autre, même pour danser », rappelle régulièrement le collectif JetLag sur Instagram. La Escuela de Perreo, qui a ouverte à la rentrée à Paris, donne aussi de la place au consentement en proposant d’apprendre à « approcher quelqu’un pour lui demander s’il veut danser avec vous, comment danser avec cette personne tout en connaissant ses limites ».
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